En Corse, une villa vintage en bord de mer
Au bout d’un chemin, on aperçoit un bloc de béton blanc sans ouverture. Imposant et solaire, il évoque les villas floridiennes des années 1960. Pourtant, nous sommes au sud de la Corse, à quelques mètres d’une plage paradisiaque. Emblématique dans le quartier, cette masse brutaliste se transforme en fenêtre sur la mer lorsque l’on y pénètre... et la magie opère. C’est cette contradiction entre volume et légèreté qui a séduit Chloé Nègre au premier coup d’œil. Attachée à la Corse méridionale, où elle a « passé toutes [s]es vacances étant petite, chez [s]es grands-parents », l’architecte d’intérieur a œuvré à rendre à cette construction délicieusement sixties ses lettres de noblesse, pour en faire la maison de vacances rêvée des propriétaires.
« Quand on entre, on découvre l’ouverture extraordinaire sur la mer. C’est une expérience sensorielle, il y règne un rapport singulier au paysage corse dans cette villa », décrit Chloé Nègre. En effet, l’intérieur et l’extérieur communiquent sans barrière dans cet espace complexe dont l’architecte d’intérieur a voulu conserver l’authenticité, à commencer par son arête murale de pierre sèche typique de la montagne corse, que l’on retrouve dehors comme dedans. « Comme tout est ouvert, on a favorisé autant que possible un cadrage vers la nature. » Les extérieurs ont ainsi été revus pour valoriser le paysage, « sans jamais prendre le pas dessus », explique Chloé Nègre, qui a privilégié des matériaux naturels comme la pierre porphyre qui pave la terrasse. Le mobilier a été pensé dans le même langage épuré, en privilégiant des couleurs brutes, à l’image des canapés Togo de Michel Ducaroy ou du mobilier d’extérieur des frères Bouroullec, dont le vert rappelle la végétation alentour.
« Ce qui est très beau dans cette maison, c’est le contraste entre les lignes du béton rectilignes et les pans de mur en pierre beaucoup plus traditionnels », poursuit l’architecte d’intérieur, qui a revu l’ensemble de la circulation dans une élégance qui laisse toute sa place au bâti d’origine. Un défi pour une maison restée « dans son jus », à honorer tout en apportant le confort nécessaire à la vie d’aujourd’hui, à l’image du chauffage dissimulé dans le sol, entièrement reconstitué sur le modèle du marbre d’origine. « La décoration s’est faite dans le respect de l’identité de la maison, tout en finesse », précise Chloé Nègre. C’est donc à l’aide de détails comme les poignées, les finitions de la salle de bains ou quelques éléments de design, qu’elle a discrètement cultivé l’esthétique des années 1960 : l’iconique Togo, quelques pièces en rotin...
Dans les chambres, l’architecte d’intérieur a osé des références plus marquées, à l’instar de la chambre jaune pop et sa grande tête de lit ronde, qui transporte plus explicitement vers l’époque de construction de la maison. En définitive, cette maison est, comme le décrit Chloé Nègre, « un numéro d’équilibriste », à la croisée entre le respect de l’existant, le luxe discret et la vénération de la nature. Toujours en subtilité, elle s’est autorisée à lambrisser le plafond du salon pour apporter de la chaleur et rappeler le paysage. Mais pas question de toucher à la façade extérieure : l’enduit en béton blanc a été travaillé comme à l’époque, épais et texturé, afin de conserver entier le charme de la maison, celui-là même qui a opéré lors du coup de foudre. « C’est un diamant brut », résume Chloé Nègre.