Architecture

Au Liban, une maison écologique digne du Seigneur des Anneaux

Dans les collines de Baskinta, la « Lifehaus » conçue par l'architecte Nizar Haddad s’inspire des techniques ancestrales pour donner la priorité à l’environnement.
au liban une maison cologique qui ressemble aux maisons de hobbit dans le seigneur des anneaux
Photo courtesy of Nizar Haddad

Une maison écologique comme celle d'un Hobbit

Dans le village libanais de Baskinta, il existe une habitation un peu différente des autres. Conçue par l’architecte Nizar Haddad, la « Lifehaus » est un modèle de maison écologique, autosuffisante et peu coûteuse, qui mêle les techniques de construction ancestrales avec la science et l’ingénierie modernes.

La propriété résidentielle de 160 mètres carrés se compose d’un studio avec un salon, une mezzanine, une terrasse et une serre. Elle est entièrement autonome et fabriquée à partir de matériaux locaux durables ou de ressources recyclées. Le projet vise à mettre en évidence le caractère durable de l’architecture historique par rapport à la construction moderne qui génère beaucoup de déchets, a une forte empreinte carbone et nécessite plus d’énergie pour être entretenue.

Photo courtesy of Nizar Haddad

« J’ai toujours été passionné par la nature et sensible à l’impact négatif de l’homme sur l’environnement », explique Nizar Haddad. « Je suis très critique de l’architecture moderne et de ses conséquences néfastes sur la planète, de l’extraction des matériaux au processus de fabrication, en passant par les bâtiments eux-mêmes, trop gourmands en eau et en électricité. Sans parler des déchets de la construction et de la démolition, qui finissent inévitablement dans une décharge. »

Fasciné par la façon dont, au fil du temps, le travail de la pierre, de la terre et de la chaux s’est perfectionné pour devenir durable, le trentenaire s’est donné pour mission de remettre au goût du jour les méthodes de construction d’antan. « Je n’essaie pas de reproduire ce qui se faisait dans le passé, mais de m’en inspirer pour mieux servir la société moderne. C’est l’idée principale de la Lifehaus. »

Photo courtesy of Nizar Haddad

Cette maison isolée à l’allure pittoresque, que l’on imagine volontiers habitée par le Hobbit du Seigneur des Anneaux, fonctionne grâce à des panneaux solaires et à un système de recyclage des eaux de pluie dans la maison. En guise d’éclairage naturel, certains murs ont été recouverts de bouteilles en verre recyclées, ce qui permet à la lumière de filtrer dans les pièces dépourvues de fenêtres directes.

Photo courtesy of Nizar Haddad
Photo courtesy of Nizar Haddad

Les murs sont faits de pierres, de briques d’argile, d’isolation en laine de mouton, de roseaux et même de pneus recyclés, afin de réguler la température de manière naturelle. Un système de tubes souterrains enfouis dans le sol permet de chauffer naturellement l’air en hiver et de le refroidir en été.

Photo courtesy of Nizar Haddad

La maison est construite autour de cinq grands principes, qui peuvent être appliqués à n’importe quel climat et n’importe quel endroit, pas seulement au Liban. Le premier principe consiste à utiliser des matériaux durables et naturels d’origine locale (ou à réutiliser des matériaux). Par exemple, les murs enduits de chaux sont remplis de 1 200 pneus de voiture récupérés dans les décharges, ce qui présente l’avantage supplémentaire d’être un matériau de construction antisismique et durable.

Le deuxième consiste à concevoir l’agencement et l’architecture de la maison en tenant compte des principes bioclimatiques, c’est-à-dire en utilisant les ressources environnementales pour aider à contrôler le climat. Enfin, le troisième principe est la gestion de l’eau. Les eaux de pluie et de rivière sont recyclées sous forme d’eaux grises (eaux usées de toutes les sorties) et d’eaux noires (toilettes) qui passent par des systèmes de filtrage à roseaux pour pouvoir être réutilisées comme eau d’irrigation. Le quatrième principe est l’énergie renouvelable.

Photo courtesy of Nizar Haddad

« En réduisant la consommation de chauffage et de refroidissement du bâtiment, je réduis également sa dépendance énergétique », explique Nizar Haddad. « Au lieu d’installer douze panneaux solaires, j’en ai installé neuf ; l’onduleur est plus petit et j’ai gagné en autonomie. Le dernier principe est la gestion des déchets : tous les déchets organiques sont compostés et utilisés pour la serre. »

Loin d’être l’œuvre d’une personne, le projet est un véritable effort communautaire : il a réuni de nombreux constructeurs de la région et d’ailleurs, désireux d’expérimenter de nouvelles techniques et d’échanger des connaissances.

Photo courtesy of Nizar Haddad

« Notre tailleur de pierre avait l’habitude de construire avec des briques de terre en Égypte », explique l’architecte. « Il connaissait la technique de construction autochtone des briques de terre crue. Sa méthode était bien plus efficace que celle décrite dans les livres. Grâce à son expérience, nous avons pu couler 800 briques par jour. Ce type de savoir-faire est en voie de disparition parce qu’il est transmis oralement, ce qui fait que la nouvelle génération perd ces connaissances. »

« Nous devons repenser notre architecture et, pour ce faire, nous devons notamment maintenir en vie ces techniques anciennes et durables », ajoute-t-il. « Ce projet n’est pas seulement destiné à voir le jour au milieu de nulle part, mais il peut être appliqué aux grandes villes ; il s’agit avant tout de choisir de construire de manière pérenne. »

Photo courtesy of Nizar Haddad

Article initialement publié dans AD Moyen-Orient.